LES AILES DES WEPPES : SUR LES TRACES DES LEBARGY, DERNIERS MEUNIERS DE FOURNES

Les ailes des Weppes : sur les traces des Lebargy, derniers meuniers de Fournes.

moulin lebargy

les restes du Moulin Lebargy en 1916. Repro La Voix

Les moulins à vent ont rythmé la vie de nos campagnes pendant près d’un millénaire. Retour dans le temps sur les traces des derniers moulins à vent des Weppes, disparus dans les tourments de la Grande Guerre. Arrêt à Fournes-en-Weppes, où l’on retrouve des traces des derniers meuniers dans le cimetière du village.

Fournes a compté jusqu’à six moulins sur son territoire. Ils sont tous visibles sur les cartes d’état-major des années 1820. Deux d’entre eux disparaissent dans la première moitié des années 1910. Parmi ces moulins, le moulin du Seigneur était sans doute le plus ancien. Il se situait le long de la grand-route qui mène à Beaucamps (il se trouvait aux environs du domaine du Chemin-Vert). Ce moulin, déjà cité en 1524, appartient aux seigneurs de Rosembois.

À la Révolution, c’est Louis-Joseph Catteau, meunier à Wattrelos et travaillant dans ce moulin depuis 1780, qui en fait l’acquisition, suite à l’émigration des seigneurs de Fournes. On le retrouve sur le cadastre de 1806, il appartient alors à Stanislas Leroy. Par contre, il a disparu du cadastre de 1832 : il a sans doute été déplacé par suite d’une loi qui demande à éloigner les moulins des chemins. Il a été démoli vers 1910.

LE MOULIN LEBARGY

Le dernier moulin de Fournes était celui des Lebargy. À l’origine, c’était un moulin à huile situé au nord de la rue Faidherbe, vers Herlies. Il a sans doute été construit à la toute fin du XVIII e siècle par la famille Leclercq. Il est revendu à la famille Becquart en 1809.
En 1882, il appartient à Narcisse Lebargy et sa femme Clotilde-Marie Dansette, cultivateurs à Fournes. Il est alors converti en moulin à farine et une remise pour machine à vapeur lui est adjointe en 1884. En 1906, il est géré par Eugénie Lebargy, fille de Narcisse et cultivatrice à Fournes. À cette époque, une briqueterie s’est installée juste à côté.
Le moulin Lebargy disparaît fin 1914, avec l’arrivée de la guerre dans les Weppes. Narcisse Lebargy est né à Wavrin le 23 décembre 1838 et s’est marié à Fournes avec Marie-Clotilde le 19 mai 1863. Ils ont eu trois enfants : Fidèle-Armand en 1863, Casimir-Victor en 1865, et Eugénie en 1868. Il est veuf en 1904 et décède à l’âge de 80 ans le 20 mai 1918. Sa tombe est toujours présente dans un coin du cimetière communal.
Eugénie Lebargy est décédée le 12 mars 1954 à l’âge de 85 ans. Elle est également enterrée à Fournes. Les Lebargy ont été les derniers meuniers du village. B. S. (CLP)

Petite histoire de la ligne Michon

Ligne Michon

 

Le train Michon, comme on l'appelait dans les neuf villages des Weppes qu'il desservait depuis 1902, est " un tortillard qui avance avec lenteur". 18km à l'heure sur des voies ferrées qui épousent le terrain de la plaine des Weppes, sur 18 km, de Don pour desservir Sainghin, Fournes, Herlies, Marquillies, Illies, Aubers et Fromelles. Le tracé du circuit forme un "S" car il a été conçu pour desservir les fermes et les usines. C'est pourquoi il serpente des deux côtés de la future RN41 qu'il coupe par trois fois. 

Sa vocation premiére est le transport des marchandises. C'est ainsi que de la betterave, grosse exploitation locale, parvient en gare de Don-Sainghin pour y être exportée. Mais dans ces neuf gares construites à l'identique, et dans ces haltes, sont aussi déchargés du charbon, des matériaux de construction et des tonneaux de bière. Le brasseur Motte Cordonnier alimentait ainsi ses estaminets. Des estaminets près des gares et des haltes où l'on se rencontrait pour parler affaires...

Dans les Weppes, le train fait aussi office de transport pour les voyageurs. Les voitures sont d'aspect classique, quoique plus petites que sur le réseau principal. Le convoi roulait si lentement, qu'on allait aussi vite à pied : si on ratait le train à Fournes, on pouvait le rattraper en courant à travers les sentiers à Herlies. Le voyage durait environ 40 à 45 minutes, voire plus d'une heure. On avait largement le temps d'admirer la campagne...

Renouveau dans les années 20..

Complètement détruite par les Allemands quand ils se retireront des villages des Weppes en octobre 1918, la ligne va connaître un renouveau dans les années vingt. Le train Michon est confié à la Société générale des chemins de fer économiques (SE). Le département du Nord en a besoin pour relancer une économie durement touchée par la guerre. La ligne est reconstruite par des tronçons dès janvier 1920. "C'est la Compagnie du Nord (reprise en 1938 par la SNCF) qui fournit la locomotive, un fourgon et deux voitures pour les voyageurs".

Le retour du train Michon (entre Sainghin et Fournes) permettra au pensionnat Gombert à Fournes de rouvrir ses portes. D'ailleurs, l'école professionnelle supérieure en usera pour sa publicité. Sur des  prospectus, était vantée la reprise de l'établissement grâce à la ligne Michon. C'est le dimanche que les élèves du pensionnat se rendaient de Fournes vers Don pour relier Lille et puis s'en revenaient le soir. Le transport des voyageurs cessa en 1929.

La ligne fut fermée en 1951.

 

 

 

 

 

 

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François Marie Raoult : Enfant célèbre de Fournes

francois marie raoult« L’an mil huit cent trente le dix mai sur les sept heures du soir par devant nous Pierre Antoine Descatoire, maire officier de l’état civil de la commune de Fournes canton de Labassée arrondissement de Lille, département du Nord est comparu Prosper Joseph Raoult âgé de trente huit ans, employé des contributions indirectes à la résidence de Lille, y demeurant lequel nous a présenté un enfant du sexe masculin né aujourd’hui à neuf heures du matin en la maison de Torcq jardinier de Monsieur le Comte de Rouvroy de Fournes de lui déclarant et de Rose Agathe Torcq son épouse et auquel il a déclaré vouloir donner le prénom de François Marie les dites déclaration et présentation faites en présence de François Marie Torcq âgé de soixante cinq ans jardinier domicilié à Fournes père grand maternel à Lienfant et Jean Baptiste Marie Buisine âgé de trente trois ans, praticien domicilié audit Fournes et ont les déclarant et témoin signé avec nous le présent acte après qu’il leur en a été fait lecture.»

Ainsi était né à Fournes celui qui allait devenir un célèbre chimiste, physicien, inventeur et théoricien.

C’est à la faculté de Grenoble que François Marie Raoult devint Professeur en 1870, puis Doyen de la Faculté des Sciences en 1889.

petit icone fleche En 1882, il énonce les Lois suivantes :

La Cryométrie : mesure des températures de congélation
• L'Ebulliométrie : méthode de détermination des masses moléculaires
• La Tonométrie : étude des solutions basée sur la mesure de leurs pressions de vapeur.

Il effectue de brillants travaux sur la force électromotrice des piles. Ses découvertes sont appliquées dès la fin du 19ème siècle. Tout ce qui subit le refroidissement ou la congélation et tout ce qui est dissous fait appel à ses Lois.

petit icone fleche Le 11 novembre 1930, Fournes a célébré le centenaire de la naissance de François Marie Raoult .

A cette occasion furent rappelés ses titres et honneurs :

• Professeur de Chimie
• Doyen de la Faculté des Sciences de Grenoble
• Commandeur de la Légion d’Honneur
• Membre correspondant de l’Institut de France et des Académies Etrangères
• Lauréat de la Société Royale de Londres (médaille Davy)
• Prix Lacaze de l’Académie des Sciences
• Prix Biennal (des cinq Académies réunies)

Fournes a choisi de faire coïncider cette commémoration avec celle de l’Armistice : en effet l’unique petit-fils de François Marie Raoult avait été tué dès le début de la guerre 1914-1918.

Parmi les personnalités présentes, on remarquait M. le Comte d’Hespel, maire de Fournes, et son Conseil Municipal, M. Chaudron, directeur de l’Institut de Chimie de Lille, M. Pariselle représentant le recteur M. Chatelet, M. Vercouttre, directeur du Pensionnat Gombert et les professeurs de cet établissement, M des Rotours, député, le lieutenant Darcy…M. et Mme Paul Raoult, neveu et nièce du chimiste, MM. Victor et Cyrille Lamblin, cousins germains du défunt.

Un service religieux eut lieu suivi d’un dépôt de gerbes aux monuments aux morts.
M. Chaudron, directeur de l’Institut de Chimie de Lille, lut le message du recteur, Président du Conseil de l’Université de Grenoble :

« L’Université de Grenoble, se souvenant avec émotion des trente années pendant lesquelles elle a eu l’honneur de compter au nombre de ses professeurs, François Marie Raoult, qui fut aussi Doyen de la Faculté des Sciences et Vice-Président du Conseil de l’Université, fidèle en ses sentiments d’admiration pour l’éminent chimiste qui a immortalisé son nom en découvrant les Lois de la Cryoscopie et de la Tonométrie, bases de la théorie moderne des solutions, est heureuse de s’associer à la ville de Fournes pour commémorer le Centenaire de son illustre fils. »

M. le député des Rotours dit combien est grande la gloire de cette commune d’avoir donné le jour au grand savant dont il retrace la modestie et le travail.
Le Maire, M. le Comte d’Hespel décide de donner à la nouvelle rue qui relie la rue Faidherbe et la rue Pasteur, en passant par la gare, le nom " Rue François Raoult ".

Une plaque commémorative avait été déposée dans la salle d’honneur de la mairie. A cette occasion, Fournes était entièrement pavoisée de drapeaux ; des arcs de triomphe avaient été érigés à l’entrée et à la fin de la rue François Raoult.

C’est en 1984 que l’Ecole Publique reçoit le nom de François Marie Raoult. Un médaillon à son effigie, taillé par M. Bersoux, est apposé sur la façade de l’école.

L’école François Marie Raoult est devenue depuis la construction de l’Ecole Publique au Clos d’Hespel, l’Espace Raoult.

Fournes sous l’occupation 1914-1918

Lundi 24 août 1914 vers 21h, les Fournois sont surpris par un coup de canon qui tonne du côté de Lille. Bientôt on entend sur la Grand ’Route (ancienne route nationale, rue Faidherbe actuelle) le grondement d’une colonne de véhicules militaires. Effrayés, les habitants demandent aux soldats :

« De quoi s’agit-il ? Pourquoi ce défilé précipité ? »
C’est le train des équipages qui a reçu l’ordre d’évacuer le matériel de la place de Lille. Après le « train », c’est le tour des cavaliers, puis des fantassins.
La population n’est pas très rassurée ne comprenant pas le sens de ces mouvements. Dès le lendemain, c’est l’image de la déroute : de 5h du matin à 14h, c’est un défilé par la Verte Rue (actuelle rue Pasteur) d’une armée de quarante mille fantassins venant de Cysoing, Tourcoing ainsi que des Belges de Tournai et d’Ath. Tous paraissent épuisés, encadrés de très jeunes officiers sans équipement et sans carte d’état-major, qui demandent :
« Où sommes-nous ? N’auriez-vous pas une carte ? »


On leur offre la carte du calendrier des PTT. Ils l’acceptent faute de mieux. Plusieurs fermiers offrent des chariots pour les soulager jusqu’à La Bassée.
Le mercredi 2 septembre 1914, les Allemands se trouvent à Lille et dès le 4 septembre, on les signale sur la Grand ‘Route.
Le maire, M. le Compte d’Hespel étant mobilisé, c’est M. Devos, son adjoint qui le remplace. Ne sachant pas parler allemand, M. l’abbé Wadoux lui sert d’interprète.
La patrouille se compose de cinq cavaliers. L’officier demande :
« Ai-je devant moi M. le Bourgmestre ?
- Parfaitement
- Je voudrais savoir si M. le Bourgmestre peut me donner sa parole que tant que nous serons sur le territoire de la commune, la population civile restera correcte et ne cherchera pas à nous nuire.
- J’ai pris, répond M. Devos un arrêté qui est affiché sur le mur de la mairie et qui défend aux habitants civils de se mêler aux faits de guerre. Soyez bien sûr que mon ordre sera suivi. »

La patrouille continue jusqu’au Lion Noir, chez M. Dubreucq. Ils se font servir à diner et en guise de paiement, remettent un « bon à payer par la France ».
Le 5 septembre, 250 Allemands défilent dans la Verte Rue, sans que l’on sache pourquoi. La suite montre qu’ils prennent position dans le pays de Weppes autour de Fournes.
La ligne du Front passe par le bas de Fromelles, Aubers, Neuve la Chapelle. Dans la région, les troupes alliées sont composées d’Anglais, d’Australiens, de Canadiens et d’Indiens et se trouvent de l’autre côté de la ligne. Fournes constitue pour les Allemands, l’immédiat arrière-Front.
Le 28 septembre, deux automitrailleuses britanniques arrivent en exploration. Les taubes allemands survolent le village. La population de plus en plus inquiète ressent la tension militaire.
Le 18 octobre 1914, un boulet tiré de la direction du Maisnil, atteint le clocher près de l’horloge. C’est ensuite la maison Delval dans la Grand ’Rue (actuelle rue Faidherbe) qui flambe avec la maison voisine, puis la maison du clerc sacristain près de l’église.
Les bombardements font rage toute la nuit. L’église est maintes fois touchée. Les toits sont criblés d’éclats d’obus de shrapnels. En début de soirée, le bâtiment à gauche du Pensionnat Gombert (actuellement Maison Saint-Jacques) prend feu. Le lendemain, les Fournois se demandent s’ils doivent rester ou quitter leur habitation. Beaucoup partent.
Dans la soirée, une équipe de soldats allemands emmènent sans explication M. l’abbé Wadoux au Pensionnat des Dames de Fournes. Il y retrouve M. Henri Devos, M. Savaete et plusieurs autres Fournois.
Français et Allemands se battent le mardi 20 octobre de 12h à 16h pour la possession de la ferme du Bois-Lasson qui forme une sorte de blockhaus stratégique. Après une première domination française, ce sont les Allemands qui l’emportent. Les vainqueurs enterrent les cadavres. Ils réunissent les blessés dans une grange. Une altercation intervient entre les gens de la ferme que les allemands accusent d’avoir dépouillé leurs morts. C’est ainsi que M. Carle propriétaire de la ferme, est ligoté et emmené au château, ses trois ouvriers (Adolphe Defache, Augustin Fontaine, et Liévin Fontaine) arrêtés et emmenés au Pensionnat des Dames de Fournes.
Dès le lendemain les trois ouvriers sont transférés à Don, puis à Douai et de là en Westphalie. M. Carle, quant à lui, est libéré le même jour.

Le 21 octobre, une femme dernière habitante du Maisnil, est amenée au Pensionnat. Elle y rejoint une trentaine de prisonniers incarcérés à titre préventif. Dans le village, les décès se multiplient : Aurélie Leclercq habitant le quartier du Cornet (actuelle Place du Monument aux Morts) est blessée mortellement, puis le père Leclercq fermier au Bas-Flandre.
M. le curé Wadoux organise ses funérailles à la demande de la famille. Compte tenu des combats aériens, force est de déposer la dépouille dans une tranchée, avant de la transporter ultérieurement au cimetière.

Cette période est marquée d’anecdotes cruelles.
Les Allemands avaient installé à travers la campagne, des fils électriques pour relier leurs différents postes. A un moment donné, ils s’aperçoivent que le courant est interrompu : quelqu’un avait dû couper la ligne. Ils constatent que le fil est sectionné près de la ferme de M. Dewisme. Celui-ci est arrêté. Il a la chance d’avoir en sa faveur, la déposition d’un wagenmeister, officier du train des équipages, qui paraît bien le connaître. Il est remis en liberté car l’auteur du délit vient d’être appréhendé : c’est un pauvre cheminot, Henri Lelardeux, 24 ans, fils d’un mineur de Bruay. C’est un de ces malheureux errants, un peu simple d’esprit. Il n’était à Fournes que depuis quelques jours, quand il eut cette malheureuse idée de couper, puis de rouler en pelote et mettre dans sa poche le fil téléphonique allemand. Il est conduit au Pensionnat et passé en conseil de guerre qui le condamne à mort. M. le curé Wadoux plaide sa cause auprès de l’Etat-major, invoquant la situation misérable et l’illettrisme du condamné. La réponse est :
« Nous reconnaissons qu’il s’agit d’un délit léger. En temps de paix, cela se règlerait par un coup de pied au derrière. Mais nous sommes en temps de guerre et la loi de la guerre veut qu’il meure. »
Il est exécuté à 15h.

Le mercredi 10 mars 1915 vers 6h du matin, un aviateur anglais profite que les Allemands, grands amateurs de bière, cuvent encore leur Duisburg, pour survoler le village à très faible altitude. Il remarque à côté de l’église une installation téléphonique assurant la liaison entre le Front et l’Arrière, il la bombarde en même temps que l’église.
A peine l’avion a-t-il passé la ligne que la bataille commence au fusil et au canon. Des obus sont lancés sur le village. L’un d’eux tombe près du kiosque et frappe en pleine poitrine Marie Dubuisson et la déchiquette.
Au même moment, des officiers allemands se présentent au presbytère et déclarent à M. le curé :
« - Vous êtes soupçonné d’entretenir des rapports secrets avec les Anglais car vous connaissiez par avance l’attaque d’aujourd’hui ; nous le savons par les femmes qui font la lessive à la Kommandantur. Nous allons perquisitionner dans votre maison et au jardin.
- Je suis prêtre, chargé des âmes, je n’ai rien à voir aux affaires militaires. Pour cette attaque anglaise que vous m’accusez d’avoir annoncé, voilà un mois que vos journaux en parlent. »

Il est consigné dans son presbytère puis emmené la nuit, chez M. Gossart à côté du kiosque où les allemands avaient établi un corps de garde. Il y reste cinq jours sans explications, puis est emmené à Seclin par les Uhlans dans une salle de l’Hôtel de ville transformée en prison. Il est libéré par le Colonel de Montgelas, officier allemand, descendant d’émigrant français et marié à une comtesse française. Ce dernier, à la demande de M. le curé, lui remet une attestation :
« Je reconnais que le sieur Wadoux, curé de Fournes a été par erreur accusé d’espionnage. »

De nouveaux bombardements le 9 mai 1915 détruisent les maisons de Melle Cardon, Melle Joséphine Dufour, l’estaminet « A St Eloi ». Les bombardements répétés font que les Allemands détruisent le clocher. En effet les cloches de Fournes et de Fromelles formaient un alignement très commode pour l’artillerie anglaise.
Le mercredi 19 mai 1915 à 20h30, après une très forte explosion, le clocher s’affaisse sur lui-même. Il ne reste plus que la Chapelle Saint-Michel pour y célébrer le culte.

La guerre 1914-1918 se poursuit. Fournes est occupé par les Allemands. Les premières lignes se trouvant à Fromelles, les Fournois sont dans l’impossibilité de résister aux bombardements répétés et quittent leur village en ruines.
Ils ne rentrent qu’à la fin de la guerre. Les Anglais occupent alors le château du Comte d’Hespel et accidentellement, déclenchent un incendie qui ravage le château.

Le bilan des pertes humaines pour Fournes est lourd : 51 militaires et 7 civils.
Le commune va honorer ses morts pour la patrie et organise en grande pompe, les 23 et 24 mai 1926, jours de pentecôte, l’inauguration du Monuments aux Morts. A cette occasion, notre village reçoit la « Citation à l’ordre de l’Armée ».
« Vaillante commune qui a courageusement supporté le bombardement qui l’a en partie détruite. Malgré les rigueurs de l’occupation, a toujours gardé une attitude fière et digne d’éloges. »
MM. Lefebvre Dominique, Vice-Président de l’Union des Combattants de Fournes
Hayaume Moui, conseiller municipal de Fournes
Médaillés militaires, Croix de guerre, Mutilés de guerre,
Reçoivent dette croix de Guerre au nom de la commune et la déposent au pied du Monument aux Morts.

Le Monument aux Morts à la mémoire des Enfants de Fournes morts pour la France se trouve place du Cornet (actuelle place du Monument aux Morts) et représente un poilu victorieux. Il a été dessiné par les architectes MM.G. Rubin et J. Renards et exécuté par M.J. Déchin.
Au pied du monument, une plaque « A nos morts glorieux 1914-1918 ». De chaque côté, les noms des 51 Fournois morts au Champ d’honneur et des 7 victimes civiles. Au dos, l’inscription rappelant la glorieuse citation dont Fournes fut l’objet et qui lui mérita la Croix de Guerre.
Morts pour la France.

ACQUART Fidèle HOCHART Joseph
ACQUART Jean-Baptiste LABALETTE Henri
BECU Ernest LEBARGY Fernand
BUISINE André LECLERCQ Désiré
BURIEZ Adolphe LECLERCQ Louis
CARPENTIER Louis LEFEBVRE Louis
CLIQUENNOIS Henri LEFEBVRE Julien
DAUMARS Régis LEFEBVRE Oscar
DAUMARS Louis LEIGNEL Henri
DEFRANCE Henri LEMAHIEU Louis
DEFRANCE Maurice LERNOULD Henri
DEGORRE Aimable LESAGE Henri
DELAHAYE Henri LOE Augustin
DELVAL Fabien MONSCOURT Kléber
DESMARET Bruno MORTAGNE Julien
DUMETZ julien MORTREUX Jules
FLOUQUET André OBERT Victor
FREMAUX Emile OGEZ Léon
FREMAUX Jules OGEZ Omer
GADENNE Joseph PATAIN Henri
GHEMERT Henri POLLE André
GHEMERT Eugène RAMON Germain
GODIN Lucien ROBIQUET Arthur
HAUTCOEUR Raymond ROBIQUET Paul
HENGEBART Albert WAYMEL Eugène
HENNEQUART Henri  

 

Victimes civiles

ACQUART Eugène – DESBUISSONS Marie – DUMETZ Cl »ment – GRUSON Charles – LECLERCQ Augustin – LEGAGNEUR Henri – Veuve LECLERCQ Aurélie.

De nombreuses personnalités s’exprimèrent à cette occasion et une lettre de remerciements à M. le Maire, M. le Comte d’Hespel et M. Vercouttre a été retrouvée dans les archives municipales, pour le dévouement apporté à l’inauguration du Monument aux Soldats morts pour la France :

« M. le Maire, M. Vercouttre,
Au nom du Comité du Monument, du Conseil Municipal, des Sociétés locales, des Familles des Enfants de Fournes morts pour la France et de toute la population dont je suis certain d’interpréter les sentiments, je vous remercie de dévouement avec lequel vous avez préparé ces journées inoubliables.
Le Comité a tenu à vous unir dans la reconnaissance, M. le Maire et M. Vercouttre, en considérant que c’est grâce à l’union de vos efforts que cette manifestation du Souvenir a été si grandiose et si attrayante. Plus de 8 000 personnes ont assisté à l’inauguration du Monument à nos Morts et ont circulé dans nos rues en admirant leur décor ainsi que celui des maisons. A notre exemple et sous votre impulsion, chacun a fourni sa part.
Vous nous avez donné une nouvelle preuve que par l’union des bonnes volontés dans l’amour de notre Commune, on peut faire de grandes choses dans un petit village.
Fournes conservera sa réputation de n’être pas un village comme les autres ; et on dira toujours avec notre petit journal de guerre « le trait d’Union » : ch’est l’pus biau Villache !

M. le Maire et M. Vercouttre, je vous renouvelle nos remerciements et vous donne l’assurance de la reconnaissance de toute la population. »

Ces journées furent illustrées par l’émission d’un cachet à date (timbre humide) dont le libellé était :

« Grandes Fêtes de Fournes (Nord)
Dimanche et Lundi de la Pentecôte 1926 »

La Fondation Antoine le Cocq

Autrefois dénommée
Hôpital de Charité

Antoine Le Cocq, bailli de Fournes et son épouse Jeanne Du Bois, firent bâtir en 1680, six petites maisons avec jardin pour y loger des veuves et des ménages pauvres, ayant au moins 60 ans.
Ces constructions élevées le long de la ruelle Saint-André, actuellement ruelle Antoine Le Cocq, prirent le nom d’Hôpital de Charité.
Une pierre enchâssée dans le mur expliquait cette charitable fondation :
« Antoine Le Cocq, bailli de Fournes et Jeanne Du Bois, sa femme, ont bâti à perpétuité cet Hôpital de Charité, consistant en six demeures pour six femmes veuves et pauvres de Fournes et à défaut de six ménages pauvres, ayant au moins 60 ans. La condition était d’aller à l’église, tous les premiers vendredi du mois, prier et chanter pour le repos des âmes des fondateurs et de leurs enfants et parents trépassés. En gage de leurs prières, ils reçoivent chacun trois « pattars » (pièce de monnaie) à chaque obit. En cas de non-respect de ces obligations, ils sont expulsés sans délai et remplacés. »


Antoine Le Cocq meurt en 1688 et son épouse en 1693. Ils sont tous deux enterrés dans l’église. Une pierre tombale de 1,44m de haut sur 0,84m de large ayant échappé aux désastres de la guerre, est toujours visible actuellement dans la sacristie de gauche. Voici la reproduction de cette épitaphe :
« Cy devant reposent les corps d’Antoine Le Cocq, bailly de ce lieu, trépassez le 25 de Mars 1688, âgé de 63 ans et Jeanne Du Bois, sa femme, qui trépasse le 14 janvier 1693, âgée de 69 ans ; lesquels pour le repos de leurs âmes et de leurs parens, ont fondez et bastis, dans cette paroisse, pour des pauvres hommes et femmes vesves et autres ménages de la Pauvreté de cette paroisse, six petites maisons et chambres, situéz sur la piedsente entre les deux chemins menans de Lille à La Bassée ; dont l’acte de donation est faicte et passez par devant maître Dubelarbre, notaire de la résidence de Lille, le dixième aoust 1681. Si ont aussi fondez en cette église, un obit solennel chacun premier vendredy de chacun mois de l’année, à perpétuité, à trois salmes et trois leçons commendaces à chanter par Monsieur le Pasteur de ce lieu, à l’assistance du chapelain pour chanter l’épître et Evangile et reste de la messe, et du clercq ; pourquoy ils ont ordonnez que soient payés douze pattars au curé, quatre pattars au chapelain et six pattars au clercq. Auxquels obitz, les pauvres hommes ou vesves et autres qui sont bénéficiez de la demeure dans les susdits petites maisons sont obligez d’assister auxdits obitz et priez Dieu pour les âmes des fondateurs et de leurs parents ; A chacun desquels pauvres hommes ou vesves, ils ont ordonnez que soient distribuez trois pattars à chacun desdits obitz. Si ont ordonnez de chanter le messe du vénérable saint-Sacrement durant l’octave chacune année et de donner chacun jour de ladite octave la bénédiction du Saint-sacrement sur le soir et paravant de sonner la grosse cloche ; pourquoi ils ont ordonnez que soient payez pour les huit messes et bénédictions pendant l’octave, chacun huit livres au curé et quatre livres au clercq ; Et pour les recommander en particulier par le curé aux prières des peuples, ils ont ordonnez quatre livres audit curé et deux livres au clercq, le tout à perpétuité et payable par les mergliers de cette église ; Pour accomplir tout ce que dessus ils ont donnez au proffit de cette «église, vingt-un cens de terre à labeur situéz en cette paroisse, en trois pièces, sçavoir, Neuf cents tenus de la mairie de Fournes tenant au grand chemin menant de Fournes à Beaucamps, de midi à la terre de Rosembois et de couchant aux terres de la cure dudit Fournes ; trois cens tenus de la ditte mairie tenant de deux cens aux terres de l’abbaye de Saint André en Cambrésis et à la piedsente menant du moulin de Rosembois au chemin des Mottes ; et les autres neuf cens, tenus de la Seigneurie de Fournes tenant à trois sens aux terres de la cense d’Hocron et de quart sens aux terres desdits fondateurs.
Si ont donnez toute une lettre de rente, passez pardevant bailly et gens de Loÿde, l’Evesché d’Arras, à Marquillies, en datte du 5 juin 1681, portant onze florins, dix-huit sols et demy par an ; au rachapt de cent soixante-quatre florins de sept et tiers de sol monnoyé d’Artois. Y obligez Jacques Leroy et Jeanne Empis, sa femme au profit des fondateurs avec rapport d’aucun héritage, y repris par habaut et tenances dont l’acte de fondation est aussi passez par devant le même notaire, le dit dixième Aoust 1681.-Priez Dieu pour le repos de leur âme. »
Pendant la Révolution, les biens ci-dessus furent retirés à l’Eglise. Les fondations et obits furent abandonnés par le clergé.
Le bureau de bienfaisance devint propriétaire et administrateur des maisons de l’Hôpital.
En 1895 ces maisons étaient en ruine. Elles furent remises en état par M.Delassus, ancien notaire. La toiture en chaume fut remplacée par des pannes et un carrelage fut posé sur la terre battue : des aménagements heureux achevèrent de transformer ces véritables taudis en maisons habitables.
Elles furent détruites au cours de la guerre 1914-1918.
En 1920, M. d’Hespel maire de Fournes, proposa à la commission administrative du bureau de bienfaisance de vendre le terrain de la ruelle de l’Hôpital et de reconstruire les maisons sur un emplacement plus vaste et mieux approprié, situé au Chemin des Combles, actuellement rue Jules Ferry ; puis au lieu de rebâtir six maisons, que la somme allouée par les Dommages de guerre ne permettrait pas de rendre confortables, il fit approuver un plan d’édification de quatre maisons seulement, plus commodes, avec étage et grand jardin. Le bureau de bienfaisance prit à sa charge la construction des deux autres maisons.
Ces maisons sont toujours habitées par des personnes âgées.
Le bureau de bienfaisance est actuellement remplacé par le Centre Communal d’Action Sociale.
Il est intéressant de noter que finalement depuis 1680, ces habitations ont toujours été destinées à l’action sociale.

L'instruction à Fournes

Dès le moyen Age, il y a des écoles dans chaque commune, principalement en Flandre.
L’histoire de ses nombreux bâtiments scolaires montre combien Fournes fut riche en la matière :
Ecoles publiques :
Jusque vers le milieu du XVIIème siècle, l’école publique de Fournes est tenue par le vicaire, puis à partir de 1650 par un clerc nommé par le seigneur et ce, jusqu’à la Révolution.
L’incendie de 1650 détruit l’école qui se trouvait à proximité du presbytère. Les habitants du hameau de La Fresnoye prennent en charge la reconstruction.
L’école subsiste jusqu’en 1844, puis elle sert de lieu de réunion pour les séances du conseil municipal. On construit une nouvelle école, place de Fournes, près du cimetière qui entourait l’église, exactement à l’emplacement de l’ancienne mairie.

En 1689, Jean Charlet, clerc paroissial, est instituteur. Son fils Pierre Hubert Charlet lui succède jusqu’en 1740.
Cette fonction est occupée de père en fils jusqu’en 1785. A cette date, Marie Joseph Pringuet obtient le poste et doit abandonner ses fonctions en 1791 à la suite de ses opinions politiques qui n’étaient pas assez avancées pour cette période révolutionnaire. Il est remplacé par Pierre Joseph Quempe, imbu de toutes les idées révolutionnaires, démagogue et exalté lors des séances du comité révolutionnaire. Il se retire en 1798.
Ecole de filles :
Jusqu’en 1793, les classes étant mixtes, Mademoiselle Marie - Joseph Seignée déclare son intention d’ouvrir une école de filles au conseil municipal et prête le serment de fidélité à la Nation. On ne sait combien de temps exista cette école, mais en 1798 elle était fermée.
Pensionnat Gombert :
En 1793 également, M. Jean François Gombert arrive du Maisnil avec l’intention d’ouvrir un établissement scolaire mixte. Il inspire le respect et la confiance, face aux excès de la Révolution.
Il inaugure son école en 1798 et obtient en 1813, l’autorisation préfectorale de prendre des pensionnaires. Son traitement est payé par la commune à condition d’instruire gratuitement les enfants pauvres. Son fils Armand Joseph l’aide dans ses fonctions et lui succède.
Après sa mort en 1876, ses petits- fils Joseph et Henri reprennent son œuvre et par des constructions nouvelles, donnent au pensionnat un nouvel accroissement qui devient l’Ecole Supérieure d’Etat. Suite à la mort prématurée de son frère, Joseph Gombert reste seul à la direction de l’établissement.

Mme Gombert dirige les classes enfantines de l’école communale des garçons qui, par suite d’un accord entre le pensionnat Gombert et les municipalités précédentes, occupait quelques classes.
Après la guerre 1914-1918, le gendre de Joseph Gombert, Alphonse Vercouttre prend la direction de l’établissement, puis son fils Jacques jusqu’en 1939. A cette date, l’école est réquisitionnée par les Allemands. A leur départ, le pensionnat laissé à l’abandon, est mis en vente.
Il sera racheté en 1948 par M. Jacques Lemaire qui le met à la disposition de l’œuvre d’Auteuil. A la suite de cette vente, la commune est mise dans l’obligation de libérer les classes occupées. La construction d’une école de garçons est alors décidée et l’école Raoult est inaugurée le 12 septembre 1954.
Ecole libre de filles : le pensionnat des Dames de l’Education Chrétienne
En 1827, deux écoles libres de filles s’ouvrent en même temps, l’une est dirigée par Dame Defante et l’autre par Mademoiselle Stéphanie Gombert, fille de Jean François Gombert.
L’école tenue par la Dame Defante ne dure que quelques années en raison du décès de sa directrice. Stéphanie Gombert est épaulée par sa sœur Marie Thérèse à partir de 1830.
Les Demoiselles Gombert tiennent l’école communale de Fournes malgré le refus persistant du conseil municipal de leur accorder la moindre allocation.
Leurs sœurs Clotilde et Eugénie les rejoignent en 1830.
En 1834 elles reçoivent l’autorisation de prendre des pensionnaires. Leur établissement jouit d’une excellente réputation et a la confiance des familles.
Stéphanie et Clotilde entrent alors dans la Congrégation des Dames de l’Education Chrétienne d’Argantan et confient leur établissement aux religieuses de cet Ordre.
Dame Stéphanie revient à Fournes en 1857 pour continuer sa première œuvre dans le pensionnat ainsi transformé. Elle en est la 1ère supérieure et sa sœur Clotilde reste au Pensionnat des religieuses de Loos et meurt à Fournes le 16 février 1864.
Les locaux devenus insuffisants, la Congrégation achète la maison voisine et les religieuses y reçoivent toutes les jeunes filles qui désiraient une excellente éducation. Dame Stéphanie meurt à Fournes le 4 octobre 1869 après une vie de dévouement et de don de soi. La Congrégation des religieuses continue son œuvre jusqu’en 1903. Peu après, atteinte par la loi sur les congrégations, elle doit s’exiler. Les religieuses se réfugient à Tournai où elles ouvrent un pensionnat.
Le pensionnat de Fournes, confisqué par l’Etat est mis en vente et sur demande expresse de l’Evêché, Mr le Compte d’Hespel s’en rend acquéreur.
Lors du départ des sœurs pour l’exil en 1904, une manifestation est organisée réunissant la majorité de la population au nom de laquelle, M. d’Hespel, maire de la commune, prend la parole.
Une plaque de marbre scellée dans le mur de la nef droite de l’église rappellera jusqu’à la guerre 1914, le souvenir reconnaissant des catholiques de Fournes, pour le bien que les Dames de l’Education Chrétienne avait fait dans la paroisse pendant plus d’un demi-siècle.
Pendant la période d’apaisement qui suit la guerre 1914-1918, M. d’Hespel offre aux religieuses de les remettre en possession de leur Maison de Fournes. D’autre part, quand il est question d’un transfert à La Bassée du pensionnat de Tournai, une démarche pressante est encore tentée mais en vain. Fournes demeure donc définitivement privée de la Maison d’Education qui avait contribué à sa prospérité et qui avait élevé son niveau moral et intellectuel. Après avoir servi d’atelier de confection, la presque totalité des locaux est détruite par un incendie en 1964. Seule une aile située face à la rue Faidherbe a été épargnée et est encore visible actuellement.
L’asile pout les tout-petits :
Un asile pour les tout-petits, dirigé par les Demoiselles Dufour et créé par Mme Casteleyn en 1871, rend de grands services : il est très fréquenté et se trouve sur l’emplacement de l’ancienne gendarmerie de Fournes, actuellement Ecole Jeanne d’Arc.
A sa mort, Mme Casteleyn le lègue à la commune de Fournes ainsi qu’une rente annuelle de quatorze cents francs. Ce legs est fait sous condition que l’immeuble ne puisse être affecté à un autre usage ; l’inexécution de cette clause devant entraîner l’annulation du legs et le retour immédiat du bien aux héritiers.
D’abord accepté puis refusé par le conseil municipal en 1880, l’asile devient donc, conformément aux dispositions testamentaires, la propriété de la famille d’Hespel qui lui conservera son affectation : au départ des religieuses, elle y adjoint une école libre de filles dans des locaux restaurés et agrandis.
En octobre 1915, le curé Wadoux décide d’ouvrir une école au presbytère, les locaux de l’école libre et ceux de l’école communale étant trop dégradés pour que l’on puisse s’y installer. La salle à manger et le bureau servent de classes. M. Henri Leignel prépare un mobilier scolaire de fortune. Melle Jeanne Salomé qui élève la jeunesse fournoise depuis un quart de siècle et Melle Léonie Maréchal en sont les institutrices.

Aujourd’hui, notre village compte :
- L’école publique du Clos d’Hespel
- L’école privée Jeanne d’Arc
- La Maison St Jacques, Fondation Apprentis d’Auteuil - Collège Ressources Privé Saint-Jacques

Les aventures héroïques de "La Jeunesse" et "Bonne Espérance"

C’est dans ce fameux hameau de Rosembois qu’il faut mentionner les exploits de deux héroïques jeunes filles, connues sous les noms de « La Jeunesse » et « Bonne Espérance ».
Jean de la Barre, curé de Marcq est l’auteur de l’histoire de ces deux héroïnes.
« Comme elle voyait son pays désolé, tantôt par les Français, tantôt par les Flamands et les Espagnols, Anne Delavaux, originaire de Lomme, embrassa le parti des armes. A l’aide de déguisements, elle obtint avec son amie, d’être admise dans un corps d’hommes à pied : Anne, sous le nom d’Antoine d’Athis, dit « Bonne Espérance » et sa compagne, sous le nom de « La Jeunesse ».
Pendant trois ans, elles servirent avec tant de bravoure qu’Anne obtint un drapeau, c’est-à-dire le droit de former un corps à part. Elle l’organisa avec une bande d’hommes d’armes et revint faire dans les environs de Lille, une guerre de partisans et y recueillit un grand butin qu’elle partagea avec sa compagne et ses soldats.

Bientôt après cette entreprise, Anne entra dans la cavalerie avec son amie « La Jeunesse » ; elle obtint une lieutenance dans le régiment du Baron de Mercy, et sa conduite si admirable dans toutes les circonstances, sa réserve, sa piété et sa bravoure à toute épreuve et dans toute rencontre, lui firent bientôt donner une compagnie.


Lorsque pendant la minorité de Louis XIV, l’armée du roi d’Espagne, Philippe IV entra en France, elle faisait partie de la division du Général Baron de Clinchamp. Ayant reçu l’ordre d’aller faire une reconnaissance, elle avança jusqu’au château de Montargis. L’intrépide héroïne s’approcha des murs du château avec tant d’audace, qu’elle mit en fuite tous ceux qui l’habitaient ou le gardaient ; elle s’en empara après une longue résistance des hommes d’armes et elle ramena au camp une vaisselle d’argent et de beaux chevaux. Mazarin occupait alors le château de Montargis et ne dut sa liberté qu’à la clémence de « Bonne Espérance ».
A l’attaque de La Bassée en 1642, ayant appris que sa fidèle compagne venait d’avoir la tête emportée par un boulet, elle accourut sur le terrain où gisait « La Jeunesse » et afin que son sexe ne fut point découvert, elle la fit enterrer toute vêtue, dans la chapelle du château de Rosembois, à Fournes.
L’armée espagnole s’étant avancée jusque sous Paris, occupait déjà une partie du faubourg St Antoine. Les troupes françaises chargèrent les ennemis avec vigueur, mais trois fois Anne ramena ses cavaliers au combat, donnant des preuves du plus grand courage ; à la troisième, son cheval fut tué sous elle et elle dut chercher son salut dans la retraite.
Anne fut blessée à peu de temps de là, de deux coups de pistolet et d’un coup de fusil ; puis elle fut faite prisonnière. Après son échange, elle reprit du service au pays de Barge, mais elle ne voulut point rester. Comme elle revenait en Flandre avec quelques officiers et soldats, ils furent attaqués et obligés de se rendre… dépouillée à nu ainsi que ses compagnons d’infortune, c’en fut fait du secret de « Bonne Espérance » !
Menée à Pont-à-Mousson et de là à Nancy, au Maréchal de Senneterre, ce seigneur accueillit la guerrière avec de grands égards et lui offrit une compagnie de cavalerie dans les armées de Louis XIV, qu’elle refusa en ces termes :
« Monseigneur, comme la seule considération de mon honneur m’a fait embrasser l’exercice de Mars, ainsi ne le puis-je garder qu’en demeurant ferme au service de mon Roi ! »
Le Maréchal loua hautement cette fille courageuse qu’il laissa partir un mois après son arrivée. Elle se rendit à Bruxelles en 1653. L’archiduc Léopold la fit recevoir à l’Abbaye de Marquette, ensuite à celle de Bilogne à Gand, où sa pension fut payée par l’Etat jusqu’à sa mort.

Rosembois

Rosembois et…

Rosembois au XIIème siècle, plus anciennement « Rose in bos » et « Rose en bois », l’un des hameaux de Fournes était couvert de marécages et de bois.
Un château fort y abritait les seigneurs de Rosembois.
La famille de Rosembois fut illustre et honorée des plus grandes dignités sous les Comtes de Flandre, les Ducs de Bourgogne et les Rois d’Espagne.

Jean de Rosembois était à la bataille de Vimiacum avec Philippe le Bon, Duc de Bourgogne. Il fut nommé gouverneur commandant de la Gallo Flandre et mourut en exerçant ses fonctions en 1489.

Le château fort de Rosembois fut assiégé en 1486 par le Maréchal d’Esquerdes qui soutenait les Flamands dans leur rébellion contre Maximilien, fils de l’Empereur d’Allemagne. Le château résista quelques jours puis fut presqu’entièrement détruit.
Antoine, fils de Jean, eut les mêmes emplois et mourut en 1503.
Pierre de Rosembois, chevalier, premier maître d’hôtel et chef des finances de Marguerite d’Autriche, gouvernante des Pays-Bas, lui succéda.
Son fils François, prévôt de la Collégiale Saint-Pierre à Lille, mourut en 1523.
C’est à cette époque que s’éteignit la famille de Rosembois.
La famille de Sainte-Aldegonde de Noircarme devint propriétaire du domaine ; un des fils reprit le titre de seigneur de Rosembois.
Messire Balthazar de Sainte-Aldegonde de Noircarme fonda alors le couvent des Récollets près des ruines du château, au lieu-dit « Hermitage », dans un petit bois qui existait avant la guerre. L’acte de donation fut passé le 20 juillet 1654 entre Balthazar de Sainte-Aldegonde et le R.P. Simon Mas, provincial des récollets des Pays-Bas.
Ce couvent devait servir d’hôpital ou de lazaret mais on ne croit pas qu’il ait jamais servi à cet usage. La communauté des Récollets s’établit donc à Fournes en 1684 dans un local provisoire.
Le couvent fut rapidement construit. Il se composait d’une maison, d’une église et d’une brasserie, le tout sur un terrain de 14 cents de terre. Le couvent avait un étage et paraissait assez spacieux ; l’église pouvait contenir environ deux cents personnes ; elle était ouverte au public et trois pères y exerçaient le Saint Ministère.
Les Récollets tinrent leur couvent jusqu’en 1790 ; ils exerçaient dans le voisinage le ministère de la prédication.
En 1789, ayant refusé de prêter serment à la Constitution civile du Clergé, les récollets se retirèrent l’année suivante mais le couvent resta la propriété de MM. De Sainte-Aldegonde; les meubles furent vendus ainsi que les tableaux. M. de Rouvroy en racheta une grande partie dont il fit présent à l’église paroissiale de Fournes en 1803. La propriété fut achetée par M. de Tilloy de Lille la même année.
En 1914, il ne restait comme derniers vestiges de « Rosembois » que des fossés en partie comblés et quelques traces de constructions. La sépulture des Comtes de Sainte-Aldegonde était indiquée par un petit monument en fonte, fortement incliné. Il est surmonté d’une croix et porte les armoiries de Sainte-Aldegonde.

Les Comtes d'Hespel

On trouve Wallerand Hespel 1er de la lignée, établi à Lille. Il participe aux campagnes de Charles le Téméraire et trouve la mort devant Nancy en 1477.
Son fils Clément, inscrit sur le registre des bourgeois de Lille en 1495, est marchand. Il a cinq fils : Baudouin, Clément, Jean, Robert et Pierre.
Deux certificats délivrés par Jean de Villers en 1571, dit Bourgogne, attestent que la famille Hespel est noble. On y rapporte dans l’un, les exploits de Wallerand de Hespel « gentilhomme et homme d’armes de la compagnie du Duc Charles le Hardy » à Mont le Hery en 1465 et à Nancy. Le second certificat confirme les armes timbrées des Hespel. La noblesse des Hespel est donc attestée à la 3ème génération, en 1571.
Le petit-fils de Clément, François né en 1607, seigneur du Grand Hocron, conseiller et maître de la Chambre des Comptes à Lille et dans le Comté de Flandre, demande confirmation de sa noblesse. Le roi d’Espagne confirme la noblesse de la famille Hespel et la dispense de payer la somme exigée en pareil cas : François et sa postérité, procréée en légal mariage, jouiront des privilèges de cet ordre. Ainsi, ils pourront acquérir et posséder en Flandre, places, seigneuries, terres, rentes, revenus fiefs et arrière-fiefs.

François Hespel achète donc des fiefs vicomtés, offices et propriétés foncières comme la seigneurie du Haut Hocron qui consistait en un grand manoir, des granges, des étables, un colombier, des jardins et une métairie.
Son fils François Séraphin Hespel (1627-1679) licencié ès lois, greffier des Etats de Lille, grand bailli de Comines, c’est-à-dire l’un des quatre seigneurs hauts justiciers, achète la terre de « La Vallée » à Wavrin à la famille de Haynin, en 1670,.
A partir de cette date, les mariages de la famille d’Hespel se feront avec des filles de « Grandes Familles ».
Pierre Clément (1660-1743) épouse une riche héritière Marguerite Fruict.
Pierre François Séraphin, seigneur de Frémicourt, épouse en 1710 Isbergue de Rouvroy, fille de Jacques Rouvroy, seigneur de Fournes, trésorier de France au bureau des Finances, qui avait acheté la seigneurie de Coisnes.
Clément Séraphin Marie d’Hespel, seigneur d’Hocron et de Coisnes, épouse en 1776 Henriette de Fourmestreaux de Wazières qui lui apporte, entre autres, la seigneurie de Rosimbois. Il fait élever dans le cimetière de Salomé une chapelle avec une inscription à la gloire de son ascendance.
Les seigneurs d’Hocron se dévouent pour les pauvres. Pierre Clément d’Hespel est ministre général de la bourse commune des pauvres de Lille. Pierre François Séraphin administre l’hôpital des Sept Douleurs en 1729 et la « Noble Famille » en 1730. Ils siègent tous deux aux Etats de Lille.
Les Comtes d’Hespel sont de grands propriétaires terriens. Ils possèdent des terres dans les quartiers des Weppes, Carembaut, Ferrain, Pévèle, Mélantois, en Artois et dans la Chatellenie de Courtrai. Ces domaines s’étendent au fil du temps plus particulièrement à Fournes et à Salomé. La famille Hespel possède et habite des maisons à Lille, rue basse et 20 -22 rue des Jardins ainsi que des résidences rurales : le château de Coisnes à Salomé et le château d’Hocron à Fournes.
Lors de la crise pré - révolutionnaire en 1788 à Lille, treize membres de la famille d’Hespel assistent aux assemblées de la noblesse pour élire deux députés et rédiger le cahier de doléances afin d’obtenir des Etats provinciaux constitués par la réunion des trois ordres et non par les quatre seigneurs hauts justiciers de Cysoing, Comines, Wavrin et Phalempin.
Clément d’Hespel signe le cahier de la noblesse qui est d’esprit réformiste. Il est nommé commissaire puis député suppléant en avril 1788.
En juin 1791 après l’équipée de Varennes, Clément s’offre avec ses fils comme otages pour le Roi; puis en octobre, il émigre à Tournai. Ses biens sont confisqués et vendus en 1793. Les fils se réfugient au Château de Manancourt en Picardie, chez leur tante Mme de Folleville puis rejoignent l’armée de Condé.
Après la Révolution, les Comptes d’Hespel viennent se rétablir à Fournes.
En 1901, Octave Edmond Marie Joseph d’Hespel , fils de Christian Adalbert d’Hespel, fonde le syndicat agricole.
En 1904, il est élu maire de Fournes. Sous sa sage administration, Fournes a renoncé aux luttes politiques et religieuses d’autrefois. Il en est résulté dès son 1er mandat, une œuvre féconde : une mairie, une école, une église, l’aménagement d’un nouveau bureau de poste avec le téléphone, l’installation de l’éclairage, la transformation des rues ainsi qu’une place dotée d’un kiosque.

Fournes pendant la Révolution

La Révolution Française 1789-1799 supprime les seigneuries et baillages, nationalise les biens de l’église, crée l’assignat et décrète la constitution civile du clergé.
Dès 1789, Fournes n’est pas épargné par la Révolution.
Hyppolite Charlet, ancien bailli du seigneur de Fournes, 1er maire élu en 1790, ne pouvant résister à la révolution qui s’accentuait davantage à Fournes et ne voulant plus aller contre sa conscience, donna sa démission après 15 jours.
Il fut remplacé par Philippe Raymond Cuvelier, puis un an plus tard par Pierre Joseph Catteaux. Ce dernier resta cinq ans en fonction pendant les plus mauvais jours de la Révolution.
Lui succéda à nouveau Philippe Cuvelier de 1796 à 1799 et Nicolas Delfosse termina la période révolutionnaire.
Sauf Hyppolite Charlet, tous furent acquéreurs de biens ecclésiastiques ou d’émigrés et furent des révolutionnaires enragés.

En 1789, le curé de Fournes était Mr Taffin. Entré le 24 juin 1789, il avait pris possession de sa cure, lorsque déjà les esprits étaient exaltés par les idées de la révolution naissante. Il refusa le serment (la loi du serment obligeait les prêtres ayant un ministère à jurer la Constitution) et abandonna sa paroisse en mars 1790 pour prendre le chemin de l’exil. Il avait caché avant son départ les vases sacrés de son église. Il fut accusé plus tard par le curé institutionnel, Mr Delaplace, de les avoir dérobés. Ce dernier prit possession de sa cure usurpée pendant la semaine de la passion 1790. On ne savait rien de ses antécédents, ni quelles fonctions il avait exercé avant de venir à Fournes. Il eut pour auxiliaires assermentés comme lui, Mr Lemosne puis Mr Crespel. Il y resta 3 ans et fut remplacé par plusieurs autres prêtres du « même genre ».
Si un certain nombre d’habitants acceptaient les secours de la religion des mains des prêtres assermentés, il est prouvé que d’autres refusaient énergiquement l’intervention de ces prêtres institutionnels au moment de leur mort. En punition de leur manque d’obéissance aux lois tyranniques, la municipalité les faisait enterrer civilement.
L’an 1792, 1er de la République Française, le 12 Novembre, les citoyens Pierre François Eugène Carpentier, commandant la Garde Nationale et Adrien Tilloy, tous deux notables de Fournes, pénétrèrent dans l’église de Fournes pour y inventorier tous les biens afin de satisfaire à la Loi du 10 septembre 1792. On y trouva 87 onces d’argent, 1 once ¼ d’or qu’on envoya à la Monnaie de Lille et des bijoux qu’on vendit à Fournes pour acheter les vases sacrés nécessaires au culte constitutionnel.
Tilloy et Carpentier dépouillèrent l’église. Les ornements furent transformés en vêtements, le baptistère en cuivre et les quatre plus petites cloches furent envoyées à Lille pour y être converties en monnaie. On réserva cependant pour les solennités publiques et les jours de Decadi (10ème jour chômé du calendrier républicain) la plus grosse cloche pesant 3000 livres. Une femme prénommée Henriette, impie et méchante, chargée des sonneries, entoura la cloche d’un cordon et la fit sonner en cet état ; elle se fêla aussitôt et se brisa. Les débris livrés à la Monnaie, on obtint en échange, l’une des trois cloches du Maisnil qui subsista jusqu’en 1878. L’église dépouillée fut vendue à un certain Durot de Wazemmes pour la modique somme de 425 Frs, par adjudication du 24 Floréal, an7.
On avait enlevé toutes les statues qu’on mutila à coups de sabre et on les jeta dans un jardin voisin. L’antique statue du Dieu de Pitié fut oubliée. Celle de Notre-Dame des Sept Douleurs fut sauvée bien que mutilée. Par un bonheur inespéré, la statue de Notre - Dame de Fournes resta dans sa niche sans que nulle personne n’y porte les mains.
Du cimetière, on exhuma et jeta au vent les cendres des sires de Rouvroy, anciens seigneurs de Fournes.
L’église servait de lieu de réunion aux membres de la Société Populaire et Révolutionnaire. Le culte de la déesse Raison fut instauré dans le Lieu Saint. La chaire était utilisée comme tribune : les patriotes y dénonçaient ceux qui refusaient les assignats ou qui respectaient encore le dimanche, dédaignant les « Decadi ». Des listes de suspects étaient établies pour être livrées au Comité du Salut Public. L’esprit révolutionnaire avait envahi un grand nombre des habitants de Fournes. Parmi les plus exaltés, on remarquait le citoyen Quempe, clerc constitutionnel et instituteur, ainsi que Carpentier, célèbre pour ses impiétés et les attentats sacrilèges qu’il commit dans l’église.
A cette époque, des bandes de brigands connus sous le nom de chauffeurs, parcouraient le pays et jetaient l’épouvante dans les fermes et les maisons isolées. Ils « chauffaient » à la flamme du foyer les pieds de leurs victimes jusqu’à ce que celles-ci leur fissent connaître le lieu où se trouvait caché l’argent de la maison.
La grande majorité des habitants était lasse de ces temps d’anarchie et souhaitaient des jours plus tranquilles.
A la fin des persécutions religieuses, les Fournois s’empressèrent de racheter et de restaurer l’église au moyen de souscriptions qui recueillirent 1212.3Frs.
Ainsi se terminaient les tristes jours de la révolution.

Notre - Dame de Fournes


Il est certain qu’en 1046 Fournes a déjà son église ; en effet, une charte de la même date dit que Gérard 1er, Evêque de Cambrai et d’Arras, avait donné l’église Notre - Dame de Fournes et ses dépendances à l’Abbaye de St André du Câteau. Tout porte à croire qu’à cette époque, elle n’est qu’un modeste édifice.
C’est le culte de Notre - Dame de Fournes qui fit le renom de Fournes.
Les pèlerinages à ce sanctuaire sont très anciens. On y vient déjà du temps des Croisades (selon les Annales Gallo-Flandriae.R.P.Buzelin) mais c’est surtout vers le XIVème siècle que les pèlerinages deviennent célèbres. Les donations faites en reconnaissance des grâces reçues sont nombreuses et considérables. Elles ne consistent pas seulement en ornements artistiquement brodés, en vases d’or et d’argent, mais ce sont aussi des terres, des jardins, des dîmes, des rentes…

Toutefois, au début du XVème siècle, l’église de Fournes a les proportions d’une église de village. A cette époque, des reliques considérables sont exposées à la vénération des fidèles. Elles sont contenues dans une magnifique châsse revêtue d ‘or et d’argent :
« On y voyait du lait de la Sainte Vierge, de ses cheveux, de son habit et de son voile, le bras entier d’un martyr et une multitude d’autres ossements sacrés ». Les reliques de la Sainte Vierge avaient été rapportées de Terre Sainte par un Croisé, seigneur de Fournes. La Basilique de Notre - Dame de la Treille de Lille possède encore une relique des cheveux de la Sainte Vierge. Le Père Quaresmius, franciscain apostolique de la Terre Sainte, rapporte :
« A deux cents pas environ de la Grotte de la Nativité à Bethléem, se trouve une autre grotte dédiée à la Sainte Vierge. C’est là que Marie, en allaitant Jésus, aurait laissé tomber quelques gouttes de son lait et aurait communiqué à la terre une vertu miraculeuse pour les femmes ne pouvant nourrir leur enfant.»
Selon un ancien écrit arménien, les reliques dites « du lait de la Très Sainte Vierge »n’étaient autres que de la Terre de cette Grotte, délayée et séchée au soleil et c’est une relique semblable que possédait l’église de Fournes.
En 1566, les Gueux, tentés par l’appât d’un riche butin, après avoir pillé l’église d’Armentières et celle de Fromelles, se dirigent sur Fournes. L’église est complètement dépouillée, la châsse profanée, les reliques jetées par terre, l’or et l’argent enlevés.
Cependant les fidèles recueillent les reliques ainsi que la statue de Notre - Dame que les Gueux n’avaient pu emporter, cette dernière devenant miraculeusement si lourde qu’ils se trouvèrent forcés de la laisser. Les fidèles ne tardent pas à venir en foule remplacer les biens perdus, par leur générosité.
En 1582, la foudre tombant sur le clocher, fit fondre les cloches menaçant d’incendier l’église. Le clocher est rapidement reconstruit.
Au début du XVIIème siècle, Monseigneur Hermann Ottemberg, Evêque d’Arras, vient à Fournes vérifier l’image miraculeuse de Marie ; il reconnaît les reliques profanées par les Gueux et les renferme lui-même dans une châsse moins riche que la précédente.
En 1642, les Fournois se réfugient dans l’église pour échapper aux vexations des soldats espagnols qui se rendaient au siège de La Bassée. Pour les punir, les soldats y mettent le feu. L’église est bientôt un immense brasier : la statue de Notre - Dame et les précieuses reliques sont consumées. En cette même année, les fidèles se préoccupent de rebâtir leur église et la statue de Notre - Dame est remplacée par celle qui existe encore aujourd’hui. Elle porte gravée sur son socle la date de 1642 ; elle est en bois de poirier.
Les habitants de La Fresnoye, très pieux et généreux, prennent en charge le traitement du vicaire, son loyer ainsi qu’un supplément pour le clerc. Ils refont à leurs frais la porte extérieure du clocher et paient les honoraires des prédicateurs du Carême qui sont à tour de rôle, jusqu’à la Révolution, les Récollets de Rosembois et les Augustins de La Bassée.
Le clocher qui avait beaucoup souffert dans l’incendie de 1642 exige de grandes réparations ainsi que le chœur et la sacristie. En 1750, le bailli convoque les marguilliers et les notables de Fournes et décident d’un commun accord que les réparations incombent aux abbés et religieux de l’Abbaye de Saint-André du Câteau qui perçoivent la dîme. Ces derniers refusent et après deux années d’expertises, une sentence du souverain baillage de Lille en date du 10 février 1752, oblige les religieux du Câteau à reconstruire le chœur et la sacristie avec les agrandissements souhaités par les Fournois et à consolider les bases du clocher. Les travaux sont terminés en 1759.
Pendant la Révolution, Fournes n’est pas préservé de l’esprit d’impiété qui souffle sur la France. L’église est dépouillée de tous ses ornements et objets du culte et vendue pour un prix dérisoire à un certain Durot de Wazemmes. Elle sert de lieu de réunion à la société populaire et révolutionnaire de Fournes. La statue de Notre - Dame est préservée.
En 1802, le culte catholique est rétabli. Les Fournois rachètent l’église. Tout y manque mais en peu de temps, l’église redevient ce qu’elle était avant ces mauvais jours.

En 1840, l’église étant trop petite et incommode, le curé Mr Ducroquet, ouvre une souscription pour la transformer et l’embellir.
Une nouvelle nef Saint-Joseph est ajoutée fin 1840. La nef Saint-Nicolas est démolie et un mur est élevé pour séparer le chœur devenu sacristie.
Malgré ces agrandissements, l’église est toujours trop petite pour la population et ses pensionnats. La châtelaine d’alors, Madame Casteleyn lègue une somme importante pour subvenir aux améliorations. Cette somme placée à intérêts capitalisés ne sera utilisée qu’à partir de 1910.
La façade de l’église est en briques. Chacun des trois portails peints en vert, est surmonté d’une fenêtre en ogive. Sur celui du milieu, « le grand portail », une grande croix sans Christ, aux dimensions du portail lui-même, avec de gros clous forgés et l’inscription I.N.R.I. au sommet. Le clocher est doté d’une horloge monumentale à quatre cadrans. L’église paraît aussi large que profonde : quatre travées seulement. Des dalles en pierre bleue en bien des endroits, cèdent la place à des pierres tombales dont les inscriptions s’effacent.
Peu à peu, l’église se meuble et s’enrichit : de grandes orgues magistralement tenues par la famille Delval et surtout par le Maître Alex, quatre magnifiques vitraux de prix « Le Mariage de la Sainte Vierge » et « le Baptême de Notre Seigneur » placés dans le chœur, « Laissez venir à moi les petits enfants » dans la Chapelle de Saint- Michel et « La Mort de Saint Joseph » près de l’autel de même nom. Deux vitraux- grisailles viennent éclairer agréablement les deux plus petites fenêtres du chœur. Le Maître –Autel en bois sculpté provient en partie de Rosembois. La nef latérale droite est dédiée à sainte Philomène. C’est l’emplacement de l’église primitive. L’autel y est surmonté de la statue de la Sainte et le fond est garni d’une toile peinte la représentant. Elle est meublée des seules stations de Chemin de Croix et d’un modeste confessionnal ; un socle supportant la statue de Saint Antoine de Padoue y est dressé.
Cette nef est réservée au pensionnat de l’Education Chrétienne. A la seconde volée de cloches annonçant messe ou vêpres, deux à deux, les élèves s’avancent vêtues d’une pelisse au col blanc, accompagnées des religieuses. L’hiver, elles portent toutes à la main une sorte de boîte en fer, chauffe-pieds rempli de braises incandescentes.
Les religieuses ont leur chapelle mais elles aiment l’église de Fournes et on les y voit souvent.
En prolongement de la nef Sainte Philomène, se situe la chapelle Saint -Michel, seule partie de l’église ayant échappé aux désastres successifs : on l’appelle aussi la Chapelle des Fonts de baptême. Une balustrade la sépare de l’église.
De chaque côté de l’autel, deux statues : le Dieu de Pitié, statue datant du début du XVIème siècle, objet de vénération de toute la paroisse et une grande Vierge en bois d’une réelle beauté. Jadis, le Dieu de Pitié était placé à l’extérieur de l’église, adossé au mur Nord. Il est fait mention de cette statue dans certains actes du XVIème siècle et il est probable qu’elle est d’une antiquité beaucoup plus reculée. Il est représenté attaché à la colonne, couronné d’épines et venant de subir l’affreux supplice de la flagellation. L’exécution n’est pas artistique et pourtant le sculpteur a su donner à Notre Seigneur un air de souffrance résignée.
On raconte qu’en 1793, on voulut l’enlever de sa niche pour le traîner dans les rues du village; on le fit donc tomber par terre, on attela des chevaux, mais on ne parvint jamais à le faire bouger. Il fallut renoncer à l’entreprise après l’avoir mutilé. Le soir venu, les Fournois transportèrent facilement cette masse énorme et la portèrent dans l’église où elle y demeura durant la Révolution.

 

Des seigneurs de Fournes au 1er maire

Le village de Fournes existait de manière certaine au XIème siècle. En effet, Fournes est mentionné dans une charte de 1046 dans laquelle Gérard 1er, Evêque de Cambrai et d’Arras, donne l’église de Fournes et ses dépendances à l’Abbaye de St André du Cateau-Cambresis, avec pour droit unique, celui de lui payer 12 deniers annuellement. Cette donation fut confirmée par l’Empereur Conrad en 1033 selon les uns et selon d’autres en 1146.
Quant au nom de Fournes, il viendrait du mot celtique FORN ou du latin FURNES qui signifient tous deux FOUR. Il se peut que notre village doive son nom aux fours à poteries.
Le pays de Weppes, du latin « vesperas » (soir, situé à l’Ouest) quartier de l’ancienne châtellenie de Lille, avait Wavrin pour capitale et comprenait 37 villages, dont Fournes.

La terre de Fournes dépendait à l’origine de la seigneurie de Wavrin, selon un acte de 1193. Notre village eut donc pour premiers seigneurs, les nobles sires de Wavrin, personnages considérables dans l’histoire de la Flandre, par leurs exploits, leur valeur et leur piété.
En l’an 1014, la famille de Wavrin était divisée en deux branches. La branche aînée vit sortir de son sein, la famille Beaufremetz. Thomas de Beaufremetz, vassal du sire de Wavrin, épousa l’héritière de Fournes. Le fils aîné, Thomas, fit bâtir un château-fort dans l’île de Coupigny.
Les Beaufremetz se succédèrent jusqu’en l’an 1414, date à laquelle, la dernière des Beaufremetz, Agnès, épouse Jean de Hingettes, désigné de son château, Jean de Coupigny.
En 1440, la maison de Fournes passe dans la maison d’Englos, sans doute par alliance entre la fille de Jean de Coupigny et Robert d’Englos.
La petite fille de Robert d’Englos épouse Pierre des Lobes vers 1449.
Après le décès du dernier héritier direct de Robert d’Englos, Simon de Gillon, la seigneurie de Fournes est vendue en 1500 à Antoine de Rosimbois qui la revend presqu’aussitôt à Robert de Ranchicourt, seigneur des Mottes à Fournes qui fit ainsi revivre en sa famille, le titre de seigneur de Fournes, dont il se disait héritier par ses ancêtres.
La famille de Ranchicourt était très ancienne. On retrouve ce nom en 1096.
Pierre de Ranchicourt, Evêque d’Arras en 1470, consacra la cathédrale de Cambrai sous l’épiscopat de Jean de Bourgogne. Cette famille était considérable par ses alliances avec les principales familles de Flandre et d’Artois.
Pierre, le fils de Robert de Ranchicourt, seigneur de Fournes en 1520, fit tailler dans une pierre l’image de Notre Dame des Sept Douleurs. Cette pierre est taillée en bosse et porte la Vierge aux sept glaives dans une niche gothique. En dessous, les initiales P.R flanquant un blason aux armes des Ranchicourt et au-dessous, une inscription en caractères gothiques :
« P. de Ranchicourt et de Fournes en l’an 1522 »
Pierre de Ranchicourt ne laissa qu’une fille qui épousa Guy de Bournonville vers 1540. Leur fils unique, Oudart fut seigneur de Fournes, Wasquehal, Bondues et autres lieux.
Son fils Alexandre porta le titre de Prince, épousa Anne de Melun et resta longtemps seigneur de Fournes. Il vendit la seigneurie de Fournes à la famille de Mérode qui elle-même la céda en 1732 à jacques Alexandre François de Rouvroy, trésorier du bureau des finances de Flandre. Son fils J.B. Louis de Rouvroy fut le dernier seigneur de Fournes.
Outre le château fort de Coupigny et celui de Rosembois dont les seigneurs formèrent une famille illustre honorée sous les Comtes de Flandre, les Ducs de Bourgogne et les Rois d’Espagne, Fournes possédait d’autres châteaux, tenus en fief de la seigneurie de Fournes :
- Le château d’Hocron dont la seigneurie appartenait à Jean Mallet en 1300. Son fils épousa l’héritière des seigneurs de Coupigny, Jean de Beaufremetz. Elle appartint ensuite à la famille Hespel
- Le château des Mottes, propriété de la noble famille de Ranchi court au XVème siècle
- Le château de la carnoye qui appartenait au seigneur de même nom également seigneur des Prés.
Un décret de 1789 supprima les seigneuries et baillages et les remplaça par des conseils municipaux composés d’un maire et d’un certain nombre d’officiers municipaux et de notables.
Le 26 janvier 1790, les principaux habitants se réunirent dans l’église en vue d’élire le maire de la commune, les officiers municipaux et notables.
Mr Hyppolyte Prudent Charlet donna sa démission de bailli et ayant réuni tous les suffrages, fut proclamé 1er maire de Fournes.